… ou comment mettre à néant tous
ses efforts capillaires.
Après de longues années de guerre
froide avec mes cheveux, la coexistence pacifique s’est peu à peu
instaurée : je ne les emmène pas chez le coiffeur, tant qu’ils ne gonflent
pas stupidement à la mode Playmobil.
Naturellement, cela ne m’empêche
pas, au quotidien, de mener une lutte de tous les instants : je dégaine le
parapluie dès la moindre goutte d’eau pour éviter les frisotis, je me coiffe
avec un peigne aux dents tellement resserrées que je me demande comment un
cheveu peut passer au travers, je lisse ma luxuriante chevelure (hem) dès le
sortir de la douche. C’est au cours d’une de ces moultes tentatives de brushing
que je remarquais un reflet suspect dans mes cheveux. J’arrêtai sur le champ le
sèche-cheveux, et examinais tout cela de plus près.
Mon flair ne m’avait pas trompée.
Avec horreur, je contemplais mon deuxième cheveu blanc.
Le premier, j’y suis
habituée : 10 ans que j’arrache à intervalle régulier ce cheveu qui
s’obstine à pousser au sommet de mon crâne, vers le haut, ce qui me confère
certes une allure ridicule mais rend le cheveu assez facilement identifiable.
Pour moi, il devait rester l’Unique.
Alors le deuxième, là, planqué
sournoisement derrière le crâne, qu’est-ce qu’il foutait là ? Je
m’empressais de l’arracher sauvagement. « Mais était-il bien seul ? »
me demandais-je avec angoisse. Une poignée de cheveux en moins et un trou dans
le crâne plus tard, je me rassurais : oui, les autres étaient toujours
noirs.
Alors je
m’insurgeais contre l’Injustice du Monde : je suis beaucoup trop jeune pour
des cheveux blancs. La preuve ?
- Mon âge commence par 2 - même
si le 3 se rapproche dangereusement.
- J’habite toujours un studio - quoique
sur Paris, peu de chances que j’en parte avant mes 50 ans.
- Je mets du vernis à ongles aux
couleurs improbables - Comment ça, être immature n’est pas être jeune ?
- Ma proprio m’appelle « la
petite jeune » - oui elle appelle pareillement les quinqua du troisième « le
jeune couple », et alors ? C’est sans doute qu’ils ne sont pas
ensemble depuis longtemps.
- Et surtout, surtout, j’ai
toujours des boutons. Et moi on m’a dit, dans ma folle jeunesse que je n’ai pas
quittée, que les boutons, c’était à l’adolescence, les cheveux blancs, à la
vieillesse. Donc logiquement, là, maintenant, tout de suite, je devrais avoir
une peau exempte de toute impureté et une chevelure noire de jais. Et pas de
taper des furoncles sur fond de cheveux poivre et sel. M’énerve.
Pendant toutes ces
considérations, j’étais restée les yeux rivés à mon cheveu blanc sauvagement
arraché. Je les relevais alors vers le miroir… pour constater que j’avais les
cheveux lisses d’un côté et frisés de l’autre, avec un trou sans cheveux au
milieu. Tout allait bien. Ce n’était donc pas sur mes cheveux blancs que mes collègues allaient jaser ce matin-là.
Allez donc faire un tour par là-bas au lieu de chercher vos cheveux blancs :